Le torchon brûle entre Carhaix et les Vieilles Charrues, mais pourquoi ?

24 avril 2024 à 9h07 - Modifié : 24 avril 2024 à 9h08 par Dolorès CHARLES

Troadec - Trehorel
Crédit : Hit West

Le torchon brûle entre la municipalité de Carhaix (29) et le festival des Vieilles Charrues, qui évoque une dernière édition cet été. Les organisateurs pointent du doigt la responsabilité de la mairie, qui vient de voter une taxe de près de 400 000 euros pour l’utilisation du site de Kerampuilh. La Ville souhaite aussi réduire de moitié les terrains occupés par les campings d’ici à 2026. Le festival en appelle aux élus du Centre Bretagne pour sauver les Charrues, mais le maire Christian Troadec se défend.

Le festival des Vieilles Charrues va-t-il vivre sa dernière édition en juillet ? 

Pour les organisateurs, le risque est bien réel : le festival breton dénonce une série de décisions, que vient de prendre la municipalité de Carhaix et qui menace l’avenir des Charrues. Pour le directeur du festival, Jérôme Tréhorel, cette crainte n’a rien d'un chantage. "Les trois dernières décisions prises par la ville ou la communauté sur des sujets de préemption où il y a nos entrées principales sont en danger ; des pertes de terrains de parking V.I.P, camping-car dès cette année, une partie des camping public l'année prochaine, et la mise en place d'une taxe qui arrive alors qu'on vient de signer une convention de cinq ans de mise à disposition. Le tout met en péril l'avenir du festival dès l'année prochaine. Si on n'a pas les parcelles nécessaires pour organiser le festival sous la forme que l'on connait actuellement, on ne peut plus faire le festival. Les Vieilles Charrues s'arrêtent."

Le directeur du festival, Jérôme Tréhorel
Crédit : Yann Launay

Les nouvelles règles sont en train d'exploser en plein vol

L’association qui porte les Vieilles Charrues accuse la mairie de Carhaix et la communauté de communes de mettre des bâtons dans les roues du festival, jusqu’à compromettre son avenir. "On est sur le site du festival depuis plus de 20 ans (1998), c'est un terrain qu'on connait par cœur et qu'on a travaillé. C'est plus de 2 millions de dons de travaux, d'animations et de spectacles qu'on a offert à la Ville. C'est 2,4 millions de dons aux associations, c'est 5 millions de retombées économiques sur le territoire, 2 500 créations d'emplois pour un festival qui est 100 % associatif et indépendant. L'objectif est de trouver les solutions pour sécuriser ces terrains et mettre en place des travaux pour améliorer l'organisation du festival, le montage des équipes, l'accueil et le confort des festivaliers. C'est en ça qu'on travaillait, mais toute ces règles là sont en train d'exploser en plein vol."

Vieilles Charrues - prévente 2023
Vieilles Charrues - prévente 2023
Crédit : Yann Launay
Le directeur du festival, Jérôme Tréhorel
Crédit : Yann Launay

"Est-ce qu'il n'y a pas d'autres problèmes au sein de l'association ?"

Les Vieilles Charrues parlent "’acharnement contre le festival. De son côté, le maire de Carhaix s'en défend. Christian Troadec rappelle qu'il est cofondateur du festival, et ne ménage pas la direction des Vieilles Charrues. "Il faut se dire les choses clairement : ils font de la politique contre la mairie, contre son maire, pour d'autres intérêts que l'intérêt du festival. Tout ce qu'ils dénoncent aujourd'hui, ce sont des choses qu'ils ont eux-mêmes signé. Ce sont des polémiques incessantes et permanentes. Ils l'avaient déjà organisé en 2019, à la veille des municipales, en annonçant un transfert sur Châteauneuf du Faou. Et là, à nouveau, ils nous font le coup du départ ou de la mort programmée... On se pose aussi la question de savoir si toutes ces polémiques ne sont pas là pour masquer autre chose. Est-ce qu'il y a pas d'autres problèmes au sein de l'association ?"

Le maire Christian Troadec
Crédit : Yann Launay

Une facture de 367 000 euros pour occuper le site de Kerampuilh

Les Vieilles Charrues viennent d'apprendre qu'elles devraient verser 367 000 euros pour occuper le site de Kerampuilh. Une facture assumée par le maire, qui explique mettre des agents municipaux, du matériel et des bâtiments, à disposition du festival.

Christian Troadec souhaite que le site soit partagé plus équitablement avec d'autres associations. "(...) il faut se poser la question de savoir qui va avoir les clés du bâtiment, et moi, je pense qu'il faut que ce soit la puissance publique parce qu'elle pourra mutualiser et faire en sorte que soit équitable entre toutes les associations. Pendant près de 20 ans, tout a été mis gracieusement à leur disposition, ils n'ont pas payé l'électricité ni l'eau. Mais une collectivité et l'exécutif sont là pour faire en sorte de respecter l'intérêt général. Lorsqu'un privé, quel qu'il soit, veut prendre plus de pouvoir ou a une sorte de sentiment de toute puissance à l'égard de l'autre, le rôle de la collectivité est de rappeler que cela doit rester public et ouvert à tous... et pas simplement ouvert aux Charrues."

Le maire de Carhaix parle de polémique lancée pour masquer les difficultés d'un festival qui serait "victime de son gigantisme". Jérôme Tréhorel souligne lui un "un retard de billetterie par rapport à l'an dernier" mais ne se dit pas "du tout inquiet, et cela n'a rien à voir avec le sujet du jour". Le directeur n'envisage pas de déplacer le festival dans une autre commune. Enfin pour l'élu breton, "des terrains de remplacement sont déjà disponibles, aux abords du site." 

Les Vieilles Charrues en appellent aux élus du centre-Bretagne pour trouver rapidement des solutions. Dans un communiqué, la Région Bretagne souhite le maintien du festival à Carhaix : "la Région souhaite un dénouement positif rapide face à la situation de blocage actuelle, et rappelle qu’elle maintient la totalité de ses engagements exprimés et votés ces dernières années en vue de la pérennisation du site des Vieilles Charrues à Carhaix."

L'édition 2024 des Vieilles Charrues se tiendra du 11 au 14 juillet, avec Sting, Gossip, David Guetta, Simple Minds, Charlotte de Witte ou encore Sam Smith.